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De la Bolivie à l'Irlande il n'y a qu'un pas...

La Paz sous assistance respiratoire

Avec ce titre, il est aisé d'imaginer que ce sont les quelque 4000m d'altitude qui m'ont fait tourner la tête. Mais ce n'est pas tant le manque d'air que l'ambiance de la capitale bolivienne qui m'a donné l'impression d'être à bout de souffle. Habituée à Cochabamba, je ne m'attendais pas à des changements si radicaux à seulement 8h de bus. Récit de trois jours à La Paz, sous assistance respiratoire...

Un vendredi de découverte à quelque 4000m d'altitude : entre chaos et calme lunaire.

Nous embarquons pour La Paz le jeudi 22 novembre. Il est 22h. Cela me rappelle nos débuts d'aventurières : au milieu du brouhaha du terminal cochabambino. Pourtant, je suis sereine. Je suis même ravie de retrouver cette apparente anarchie. Mais le calme va très vite laisser place à l'étouffement...

Nous arrivons au petit matin. Il fait froid. Nous sommes à la fois fatiguées et heureuses d'être là. Pourtant, le stress va très vite refaire son apparition : Adeline a oublié ses lunettes de vue dans le bus. Nous faisons le tour des bus pour enfin parvenir au nôtre. Nous les retrouvons sous notre siège et c'est alors que l'homme en charge du ménage nous propose de nous les vendre... Pas fou! Nous parvenons à nous esquiver tranquillement et essayons de remettre nos idées en place et de reprendre notre souffle. La sensation est infime mais je sens pourtant qu'un effort trop intense pourrait me causer des vertiges. Tout mon corps me prévient que je dois le ménager... Nous prenons un taxi pour aller jusqu'à un hôtel où nous pourrons laisser nos sacs-à-dos. Le taxi démarre et nous fait quelques frayeurs. De nombreuses rues sont en pentes très très raides ici. Je dirais facilement entre 60 et 75°... Nous avons l'impression que le moteur va lâcher avant d'arriver en haut... Et puis ce n'est pas tout. Il est tôt et pourtant il y a énormément de trafic. Mais je n'y fais pas vraiment attention pour le moment, je veux juste pouvoir me poser. Nous réservons la chambre pour les deux nuits et entreprenons de trouver un petit-déjeuner. Contrairement à nos premières excursions, nous n'hésitons plus à demander aux commerçantes qui sont souvent de bon conseil -nous préférons éviter les aléas des discussions avec le sexe opposé...- Elles nous indiquent le marché Lanza où nous trouvons notre bonheur : un sandwich de huevo (oeuf) y un maté de coca! Très différent de ceux de Cochabamba, ce marché se découpe en rangées de petites «tiendas» en tôle et de plusieurs sections (comidas, flores, joyerias...).

La Paz sous assistance respiratoire

Il est un peu plus de 8h lorsque nous commençons à déambuler dans les rues. L'air est rare mais pas seulement par manque d'oxygène! Pour moi, ce serait plutôt par excès de CO2 dû à la pollution... Ma gorge est sèche, mon nez est agressé, mes yeux ont du mal à s'habituer et mes oreilles sont tellement sollicitées par les klaxons, voitures, cris et autre, que ma tête se manifeste avec une céphalée dont je me serais passée. J'ai du mal à croire que tant de personnes puissent aimer vivre ici (900 mille habitants). C'est une grande ville, certes, mais c'est surtout le chaos le plus total. Je n'avais jamais vu ça nulle part ailleurs... Les gens se croisent, se bousculent, ne se préoccupent pas de ce qui se passe autour d'eux. Les working men se font cirer les chaussures par des fantômes qui déambulent discrètement dans les rues. Des hommes et des enfants portant des tenues sombres et des cagoules. Même leurs yeux peinent à ressortir. Je les trouve effrayants... Est-ce pour ne pas être reconnus? Auraient-ils honte? Je pense que la raison est enfouie bien plus profondément au cœur de cette ville... Et puis il y a ces patrouilles de police, partout, tout le temps. Police de la ville, militaires et même police touristique! Je me sens oppressée. Cette ville m'étouffe littéralement. Elle donne l'impression qu'il faille faire attention à chaque personne qui passe à côté de soi. Comme si elle nous poussait à développer une forme de paranoïa. Nous continuons malgré tout notre visite et parvenons sur la place centrale où nous entrons dans une cathédrale immense et... calme. C'est apaisant! Sur la place, on observe également le palais présidentiel, plutôt impressionnant.

Entre artisanat traditionnel et marché des sorcières...Entre artisanat traditionnel et marché des sorcières...

Entre artisanat traditionnel et marché des sorcières...

Puis nous décidons de nous rendre au marché des sorcières... C'est en réalité une rue qui débute avec des magasins d'artisanat local et qui s'achève avec des «tiendas» plus sombres, qui arborent des fœtus de lamas en devanture, herbes et autres amulettes protectrices. Nous flânons un bon moment avant de trouver le musée de la coca. Même s'il ne semble pas très entretenu nous y apprenons quelques détails important. Par exemple, lorsque nous buvons notre maté du coca du matin, nous ingérons 1mg de cocaïne... Ou encore que l'église catholique a d'abord déclaré cette plante comme diabolique avant que les colons se rendent compte qu'elle était nécessaire au travail sans répit des esclaves...

La Paz sous assistance respiratoire

La matinée passe et Adeline a une grande idée : passons l'après-midi à la vallée de la lune, loin de ce chaos! Ni une ni deux, nous nous y rendons en truffi. Nous sommes totalement épuisées et découvrons avec bonheur un parc éco-touristique sans touristes(du moins, pas lorsque nous y étions)! Je n'en reviens pas de passer d'une grande ville à un paysage naturel, désertique et lunaire, en seulement 30 minutes. Je n'arrive même pas à trouver les mots pour décrire cet environnement. Je n'avais jamais été sur la lune, c'est fait! Malgré la chaleur, nous avons bien profité du silence et de la nature.

Il est à peine 17h lorsque nous retournons à La Paz pour déguster une glace au «Dumbo» (chaîne de glaciers, pâtissiers présente dans tout le pays) et aller nous coucher. Demain, nous allons pouvoir fuir la ville une fois de plus pour visiter les ruines de Tiwanaku.

Un samedi à Tiwanaku, ou découverte des restes d'une civilisation pré-inca...
La Paz sous assistance respiratoire

Lorsque l'on parle d'Amérique latine on évoque souvent le Machu Picchu et les incas. Peu de gens savent qu'il a existé une civilisation bien plus ancienne et qui a prospéré et régné bien plus longtemps sur l'Alto Peru (qui correspond plus ou moins au Pérou et à la Bolivie actuelle) : le peuple de Tiwanaku.

Nous sommes samedi matin. Après avoir pris un petit-déjeuner au marché, nous partons à la recherche d'un truffi direction Tiwanaku. Nous ne savons pas vraiment ce qui nous attend. Les guides (lonely planet et petit futé) conseillent les visites guidées mais pour nous c'est hors de question. Nous essayons de fuir les groupes de touristes, pas de les intégrer. Il faut 1h30 de route sur l'altiplano pour rejoindre le site. En arrivant, nous ne voyons pas grand chose, excepté la «ville» et un grand bâtiment en céramique qui doit être un musée. Nous achetons nos entrées (pour deux sites de ruines et deux musées) et prenons le temps d'un café. Nous en profitons pour demander des conseils de visite à la propriétaire du café qui s'avère prolixe sur le sujet. Puis nous nous lançons à la découverte de ce peuple, ou plutôt des traces qu'il a laissées. A l'entrée nous croisons trois lamas attachés (en mode tondeuse naturelle). Il est entendu que nous les approchons le plus possible pour prendre une photo -nous n'en restons pas moins des touristes!-, jusqu'à ce que je l'entende se racler la gorge... Je ne veux pas tester la patience des lamas et préfère m'éloigner... La visite débute alors. Peu à peu, les contours des ruines se dessinent : des pyramides en escaliers, des statues, des sculptures en pierre... Le mode de construction de ce peuple est très intéressant. C'est très différent du Machu Picchu. Ici, les constructions en pierre sont limitées (même si la taille des blocs reste impressionnante). Les murs sont un mélange de terre et de paille. Aujourd'hui, on devine les anciennes constructions mais il est difficile de s'en faire une image très précise. Il faut dire que ces ruines datent de 600 av. J-C!

La Paz sous assistance respiratoire
La Paz sous assistance respiratoire

Cependant, je reste éblouie par l'intelligence de ce peuple. Ils avaient un système d'irrigation très développé, une maîtrise technique étonnante pour l'époque et semblaient avoir une organisation politique très poussée. Certains historiens considèrent même qu'ils étaient aussi avancés que dans l'Égypte ancienne... On dit qu'au IX ème siècle, le retrait du lac Titicaca loin de la ville, ou peut-être une guerre avec les kollas (les aymaras venus de l'ouest) ont précipité leur chute pour laisser place aux incas.

Le musée de céramique présente de nombreuses poteries peintes avec précision. Aux vues des représentations ils semblaient très proche de la nature et des animaux (surtout des lamas). Puis nous passons dans le second musée, défraichi et...étrangement vide. Nous entrons dans une salle sur la droite et tombons nez-à-nez -ou plutôt nez-à-genoux- avec une représentation magnifique de la pachamama. Une statue en pierre de près de 7m de haut qui impose le respect et le recueillement... Finalement, même si les lieux pourraient être mieux entretenus, c'est un site à voir. Ne serait-ce que pour se souvenir de ce grande peuple à l'origine de tous les autres. Et le mieux, c'est qu'il n'y a pas encore trop de touristes!

Nous repartons pour La Paz vers 16h. Nous sommes les seules passagères du truffi. De quoi profiter pleinement du paysage qu'offre l'altiplano. Une vaste étendue plane encerclée par les montagnes. Parfois, un pic enneigé se dessine au loin. Pour moi, c'est irréel.

Et puis, retour au chaos de la capitale...

Dimanche : prendre toujours plus de hauteur...

Pour nous, venir à La Paz sans pouvoir l'observer d'en haut serait dommage. Nous voulons prendre un peu plus de hauteur. Hier, au retour de Tiwanaku, nous avons pu observer brièvement la ville et nous avons repéré un point depuis lequel on la voyait quasiment dans son ensemble. Il ne reste plus qu'à le retrouver...

Comme si la ville n'était pas assez bruyante de jour comme de nuit, nous avons droit à un réveil matinal... Un groupe de jeunes, une classe ou je ne sais quoi, envahissent littéralement l'hôtel en criant et en marchant avec la discrétion d'un éléphant. Aucun respect. Tout ce que j'aime pour me réveiller... Une heure plus tard, le réveil sonne et je sors pour me rendre à la salle de bain. Là, une jeune fille, grand mal lui en a pris, me dit que c'est son tour. Ceux qui me connaissent doivent imaginer l'humeur massacrante dans laquelle j'étais alors. J'en tremblais. Je lui ai alors bien expliqué les raisons de ma colère, en espagnol, et je suis entrée dans la salle de bains -oui je peux m'énerver clairement en espagnol!-.

Après avoir réussi à nous préparer, et comme depuis deux jours, nous allons prendre notre petit-déjeuner au marché Lanza. J'arrive peu à peu à retrouver mon calme. Nous tentons alors de retrouver le chemin du fameux point de vue. Loupé! Nous nous retrouvons à la sortie de La Paz... C'est haut...nous pouvons voir la ville...mais c'est pas encore ça. Nous décidons de prendre un taxi. Bien entendu, nous tombons sur celui qui nous dit qu'il sait mais qui ne sait pas... Il se met à descendre alors que le fait est connu : les points de vue sont rarement en bas... Bref, nous tournons jusqu'à ce que je reconnaisse un parc et que je lui indique la direction. Nous arrivons donc finalement à notre fameux point de vue! Et il est entendu que si le ciel était dégagé, ce ne serait pas amusant! Nous nous demandons d'ailleurs s'il n'y a pas un nuage permanent de pollution au dessus de la ville. Malgré tout, nous pouvons admirer la ville et même par moment le pic enneigé Illimani (qui culmine à 6450m d'altitude).

Vue de La Paz (on distingue le pico Illimani au fond).

Vue de La Paz (on distingue le pico Illimani au fond).

Il est temps de retourner à notre doux foyer à Cochabamba, loin du chaos paceño! Mais pour finir ce week-end en beauté, la police arrête le bus pour un soi-disant contrôle de narcotrafic... Pour moi, ça veut surtout dire qu'ils envisagent de regarder mon passeport et voir que je suis dans l'illégalité depuis mardi (mon visa a expiré)... Adeline me propose de montrer simplement une photocopie. Après tout, ce n'est pas la douane! Mais finalement, personne ne nous a rien demandé. Nous en concluons qu'ils devaient être à la recherche d'une personne en particulier et qu'elle ne devait pas être européenne.

Lors de ma prochaine visite à La Paz, s'il y en a une, le masque à oxygène sera de rigueur!

La Paz sous assistance respiratoire
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